Cet article aurait presque sa place dans la catégorie “Rire”, vu qu’il n’y a pas de catégorie “Pleurer”, catégorie qui risque bien de voir le jour si l’actualité continue de nous envoyer ce genre de perles.
Pour rappel donc, France bleu nous annonce le 23 mars que Pour aller aux toilettes, les salariés de Teleperformance à Blagnac doivent demander une autorisation par mail. Voir l’article complet ici par exemple, Cette info a largement fait la une des médias ces derniers jours, jusqu’au démenti formel de la direction vu dans cet article de France 3 : “La Direction de Teleperformance France tient à préciser que les informations diffusées récemment concernant les pauses physiologiques des conseillers clients et largement relayées dans les médias ne correspondent pas à la réalité de notre fonctionnement ni au dispositif mis en place. Le système en cours d’installation et de paramétrage, et déjà utilisé par certains centres, ne pose aucun problème spécifique et est conforme à la législation du travail et aux accords de branche. Teleperformance est de par sa nature une entreprise où l’humain est central et tous systèmes et processus sont construits dans le respect de ses collaborateurs”.
Bon ça reste un peu flou, France 3 évoque une “erreur de paramétrage”, faudra m’expliquer comment on fait ce genre d’erreur. Mise en situation : “Bon les gars, quel est l’abruti de consultant qui a coché la case “pause pipi” ?”. Ce qui voudrait dire que la case existe ? Ah la la.
Quoiqu’il en soit, industriellement parlant, il n’est pas du tout idiot de chercher à remplacer les pauses-pipi pour éviter de stopper une ligne de prod, dans certains métiers c’est même totalement indispensable, mais faut-il vraiment passer par un logiciel pour ça ? Ne pourrait-on avoir des petites équipes autonomes capables de s’auto-remplacer quand Roger voit que Claudine est partie pisser ? Bah non, comme “l’humain est central” dans cette entreprise, on va bien veiller à “centraliser” la prise de décision auprès d’un cadre forcément bien plus compétent pour déterminer si Claudine peut ou pas aller aux toilettes. La blague étant que, toujours selon l’article de France 3, “le risque selon les syndicats, était le taux de “non-réponse”, les cadres étant aussi appelé à faire autre chose que de répondre à ces demandes”. Tu m’étonnes. A la place du syndicat, ce n’est pas le principal truc qui m’inquièterait.
Bref, encore un logiciel de productivité qui part du postulat que les gens sont fondamentalement glandeurs et inaptes à l’entraide, qu’il faut donc 1 : un chef pour décider à leur place, 2 : un logiciel pour communiquer avec le chef en question, 3 : plus de contrôles, et qui a pour conséquence une grève de 3h pour commencer (soit pour 200 personnes 36 000 pauses-pipi supplémentaires non remplacées, à 1 minute la pause pipi), un joli buzz négatif sur le web, une baisse de la confiance entre les chefs et les opérateurs, donc une baisse d’énergie, donc… Une baisse de productivité ! Sans compter les arrêts maladies, l’absentéisme et la belle ambiance (de chiottes ?) qui résulteront de l’opération. Je plains le gars qui va présenter la comparaison entre le retour sur investissement prévu et le gain réel de l’opération une fois tous les effets collatéraux identifiés. Rassurez-vous : personne ne le fera vraiment.
Moralité : quand on est convaincu que les gens sont cons, on finit par mettre en place les conditions prouvant qu’effectivement ils le sont. A noter que l’inverse est vrai, quoique plus rarement utilisé rapport au fait qu’être convaincu de l’intelligence des gens n’aboutit que rarement à l’achat d’un logiciel… Et oui : prendre les gens pour des cons rapporte beaucoup plus à cette industrie-là.